Parmi les finalistes du festival international de la mode, de la photographie et des accessoires de Hyères de cette année, pas moins de quatre sont diplômé·e·s de La Cambre à Bruxelles. L'une d'entre elles est Eunji Oh, qui a été nommée finaliste dans la catégorie des accessoires avec sa collection "Overweight". Elle s'est également qualifiée en tant que finaliste du concours ITS 2023, qui récompense les talents les plus promettereuses dans les domaines de la mode, des accessoires, de la joaillerie et des œuvres d'art.
MAD s'est entretenu avec Eunji au sujet de sa collection, de ses rêves et du chemin parcouru lors des différents concours de mode.
Pouvez-vous vous présenter ? Qui est Eunji Oh ?
"Je m'appelle Eunji et j'ai 27 ans. J'ai d'abord obtenu un diplôme en design industriel. Ensuite, j'ai commencé à étudier à La Cambre où j'ai terminé mon master en accessoires il y a 6 mois. Actuellement, je suis une formation de 2 ans en maroquinerie au Campus Arts et Métiers de l'Institut Jeanne Toussaint."
"Après mes études à La Cambre en Accessoires, j'avais vraiment envie de me plonger dans le monde du cuir, d'affiner mes compétences. Non pas que je veuille me concentrer uniquement sur ce métier, je veux vraiment faire une carrière de designereuse. Mais en tant que designereuse, spécialisée dans le cuir, je pense qu'il est important de connaître et de maîtriser le métier. Parallèlement à ma formation en maroquinerie, je me prépare à des concours. J'ai été sélectionnée comme finaliste pour ITS Contest 2023 et le festival international de la mode, de la photographie et des accessoires, Hyères Festival."
L'année dernière, vous avez obtenu votre diplôme d'accessoiriste à La Cambre avec votre projet de fin d'études OVERWEIGHT, quelle est l'histoire de votre collection ?
"L'histoire de ma collection est personnelle. Je pense que de nombreux créateurices s'inspirent de leur enfance ou d'une expérience qu'ils ont vécue. Je suis née et j'ai grandi dans une famille coréenne. Et la vision que nous avons du corps féminin est vraiment différente de celle des Européen · e · s. Pendant mon enfance, j'ai hérité de nombreuses valeurs contraires à la vision occidentale de la beauté et du corps. J'ai vraiment ressenti le contraste entre ces deux cultures. De plus, j'ai eu beaucoup de problèmes de peau pendant mon enfance, ce qui m'a obligée à prendre beaucoup de médicaments. À cause de ces médicaments, mon physique changeait constamment. J'étais souvent gonflée, puis à nouveau très maigre."
"J'essaie de parler de ces histoires personnelles dans ma collection. Il s'agit de mon corps, du fait d'être à l'étroit dans mes vêtements, d'un corps qui change, de la tendance à porter des vêtements très près du corps, du fait de ne pas se sentir à l'aise dans les vêtements...". Cette histoire s'inscrit visuellement dans l'esthétique de la collection. J'ai cherché des images qui représentent le corps "emprisonné" dans les vêtements, mais aussi le corps "emprisonné" dans la société. Par exemple, j'ai serré mon corps avec des sangles. Ou encore, j'ai comparé le corps à un bonhomme Michelin ou à un morceau de viande."
"C'est un sujet qui parle aux gens d'aujourd'hui, mais mon intention n'est certainement pas de parler d'un sujet lourd. La collection parle toujours de mon histoire personnelle. C'est consciemment que je n'ai pas voulu que le message de ma collection soit trop lourd. Je pense qu'il est important d'inclure de l'humour pour alléger un peu le sujet. Des noms pompeux comme "The love handle bag" et "Chubby Shoes" permettent aux gens de rire de ma collection. Le résultat est une collection positive, parfois drôle, mais qui reste porteuse d'un message fort."
Continuez-vous à travailler sur la collection ?
"J'ai perfectionné la collection et affiné mon discours. J'ai également élaboré certaines pièces pour les prêter à des concours. Par ailleurs, j'imagine déjà une suite à la collection 'overweight'. Je fantasme parfois sur une 'boob series' ou une 'feminine body series'. L'esthétique sera peut-être un peu différente, mais il y aura toujours un sentiment de "surpoids" dans les collections. C'est ce que je trouve intéressant dans l'histoire de ma collection. Le terme "surpoids" peut désigner tellement de choses. Il peut faire référence au corps, à la graisse, à la société... C'est un projet que je développerai à l'avenir."
Vous êtes l'un.e des finalistes du festival de Hyères et du concours ITS 2023. Vous avez reçu des conseils de MAD Brussels pour vous préparer pour ces concours. Comment avez-vous vécu ces concours jusqu'à présent ?
"J'ai vraiment appris à m'organiser pour ces concours. Je dois respecter beaucoup de délais, je fais tout moi-même. Il est également plus difficile de préparer deux concours en même temps. Un concours demande des éléments spécifiques que l'autre ne demande pas. Le mot clé pour passer la sélection est 'organisation'."
"La partie la plus difficile est la procédure de sélection pour obtenir une place parmi les finalistes. J'ai dû préparer beaucoup de choses : mon portfolio, des textes, des images, des vidéos, ... La présentation de votre projet est évidemment très importante à ce stade. Par ailleurs, un concours comme celui-ci est aussi un investissement budgétaire, pour envoyer ses pièces, imprimer un portfolio de qualité. C'est vraiment un exercice où, en tant que jeune designereuse, vous apprenez vraiment à penser, écrire, manipuler et regarder votre travail d'une manière différente. J'ai eu la chance que certains de mes ami · e · s aient déjà été sélectionné.e.s par le passé pour le festival de Hyères. J'ai pu leur demander beaucoup de choses pour m'aider à mieux me préparer et à anticiper."
"J'ai connu un peu de stress et d'incertitude pendant les préparatifs. Mais j'ai appris qu'il ne faut pas se lancer dans un concours en se disant 'si je ne suis pas élu·e,, tout cela aura été en vain'. Ce n'est jamais vrai, on apprend toujours quelque chose. Le concours m'a permis d'élargir mon travail et d'entrer dans une nouvelle phase. Une fois que j'ai eu cette idée en tête, les préparatifs se sont un peu mieux déroulés."
Comment voyez-vous l'avenir de votre travail ?
"Pour l'instant, je suis ouverte à toutes sortes de propositions et d'opportunités. Que ce soit en travaillant pour une marque ou en me lançant en tant que freelance, je pense que les deux options me permettront d'acquérir des compétences spécifiques. Mon objectif pour cette année est de me concentrer sur les concours. C'est aussi parce que je suis curieux de voir si des portes s'ouvriront après cela. En fonction de cela, je déciderai de ce que je ferai l'année prochaine. Je ne place pas tous mes espoirs dans les concours, mais si une proposition intéressante croise mon chemin, je sauterai le pas."
"Mon rêve, comme celui de nombreux créateurices débutant·e·s, je pense, est de créer ma propre marque. Rêver, voir grand est important pour moi. Mais il y a bien sûr aussi la réalité. C'est pourquoi je verrai ce qui se présentera sur mon chemin."